Avec 30 ans d’expérience dans la communication extérieure, Pascal Boutel, P.-D.G. d’Urban Connect, exerce son métier avec passion et enthousiasme. Ex-directeur général du groupe CBS Outdoor France, son envie de changement l’a amené à créer sa start-up. Il vous raconte son histoire.
Pascal Boutel : Libre, féministe et disruptif !
P.B : Essentiellement un seul secteur d’activité mais avec différentes missions au sein d’une même entreprise, et un parcours qui s’est toujours déroulé sur des cycles non voulus de 4 ans. D’une manière inconsciente, je pense qu’au bout de 4 années il y a eu un besoin physiologique de changement. J’ai évolué 25 ans dans un groupe groupe historique qui s’est successivement appelé Giraudy, CBS Outdoor et puis Exterion Media. J’ai intégré la société en 1990 en tant que commercial pour terminer au poste de directeur général France, chargé du réseau, en 2010.
P.B : Voilà ! En 2016, j’ai créé Urban Connect qui évolue dans le même secteur d’activité : la communication extérieure. Il y a eu un changement d’appellation, puisque les grandes sociétés du secteur, telles que Clear Channel et JCDecaux, s’appelaient des « sociétés d’affichage ». On a aujourd’hui des sociétés de communication extérieure, ce qui est dû notamment à l’arrivée des évolutions technologiques.
Pascal Boutel : Elle est partout, elle est sur le cloud ! Urban Connect est immatriculée à Bernay, parce que je suis Bernayen. Mais nous n’avons pas de localisation spécifique au regard de notre projet et notamment de mode collaboratif. Nos points de rencontre se situent actuellement à Évreux, au sein de la Smart’up, la pépinière d’entreprises numériques, mais aussi à Sotteville-lès-Rouen. Nous allons développer un tiers-lieu, à Caen, pour travailler notre développement en Basse-Normandie. Cependant, le projet passe nécessairement par le positionnement « physique » de notre siège à Bernay, sujet qui sera travaillé avec les collectivités locales en 2022. Notre stratégie de développement induit la construction de projets avec les collectivités, pour mettre en place des solutions de communication extérieure. Ceux-ci se concrétisent principalement par des concessions de mobilier urbain de communication, mais aussi par d’autres projets d’aménagement.
P.B : En ayant parcouru la France pendant 15 ans, j’ai constaté que la région Normandie et particulièrement le département de l’Eure avaient un certain retard dans ce domaine. Je crois par ailleurs que de beaux projets sont à construire sur les territoires urbains. Il y a une vie, une nouvelle économie qui démontre encore plus que tout ne doit être pas et ne se fera pas uniquement dans les métropoles. Travailler le sujet de la communication extérieure dans les petites villes n’est pas le chemin le plus simple, mais c’est le plus intéressant à mon sens, car il est fortement contributif ! Pourquoi Bernay ? Parce que j’y vis et que quand on vit quelque part, quel que soit le métier, on a envie de contribuer et d’apporter ce qu’il y a de meilleur.
Pascal Boutel : On n’ose jamais assez ! Il pourrait dire : « Ce n’est que le début. Il ne faut surtout pas perdre de temps ! »
P.B : J’en ai eu beaucoup ! À l’origine, durant mon adolescence, j’ai eu deux pères spirituels, deux personnalités atypiques, des hédonistes qui avaient un gros vécu et qui m’ont initié à l’école de la vie. Mes amis proches ont également été fort présents de par leur personnalité et leur affection. Dans le monde purement professionnel, j’ai eu la chance d’exercer sous la responsabilité de grands présidents, brillants, tous différents dans leur excellence. Mon métier m’a permis de rencontrer des gens qui venaient de divers univers ! On s’enrichit de ces rencontres, on ne voyage bien qu’à travers le regard des autres et on apprend bien qu’avec le regard des autres.
Pascal Boutel : Notre moteur, c’est l’innovation, l’acte créatif. J’aime emprunter des chemins que je ne connais pas et faire en sorte, chaque jour, pour moi et pour mes collaborateurs, que ce ne soit jamais la même chose. L’innovation, c’est la garantie de rester en vie. Nous avons à l’origine du projet de notre entreprise une stratégie simple et très lisible. Mais il y a une forme d’ouverture qui nous amène à développer au fil du temps notre offre de service. Au début, notre activité consistait à vendre des espaces publicitaires et en fait, aujourd’hui, la moitié de notre activité sort de la régie des médias. Nous avons développé de nouveaux services, des prestations, telles que le conseil, la vente de solutions de communication extérieure, l’audit, l’événementiel visuel, les réalisations artistiques… Nous exploitons tout le potentiel de notre studio de création interne pour pouvoir créer du contenu et imaginer des solutions sur mesure.
P.B : La curiosité, l’ouverture d’esprit, et aimer les gens !
Pascal Boutel : La direction de mon ancienne entreprise a mis en place un plan social qui n’était pas pertinent. Il a été particulièrement destructeur en raison notamment de la longueur dans sa mise en place. Le plus gros challenge a été de reconstruire l’entreprise et de remobiliser les énergies. C’est à ce moment-là que j’ai pris la direction générale de CBS Outdoor France.
P.B : J’en identifierai deux bien différentes ! La première fut d’avoir remporté une compétition importante face au leader mondial alors que ma société était de très loin “challengeur” : la concession de mobilier urbain de Lille. On n’avait pas les outils, ni les références pour pouvoir en toute logique la remporter, et pourtant nous l’avons gagnée ! La seconde, c’est qu’aujourd’hui la structure d’Urban Connect, qui n’est certes pas très grande (11 salariés), s’est approprié l’entreprise. Et ça, c’est encore plus important et structurant !
Pascal Boutel : Notre plan stratégique, écrit en 2016, reposait exclusivement sur le développement de concessions d’écrans digitaux outdoor ; il reste aujourd’hui le cœur de la stratégie. A ce jour, plus de la moitié de notre activité et de notre chiffre d’affaires concernent d’autres prestations de service que nous n’avions pas imaginées lors de la création. Nous avons maintenant tous intégré, ce que chacun accepte de manière très positive, que dans 5 ans nous aurons un positionnement fortement différent de ce que nous avons écrit à l’origine, et ce sera très bien comme ça. Je vais continuer à lâcher les possibilités d’initiatives, à aller vers d’autres univers et à développer notre offre de service. J’aime le slogan du moment d’Europe 1 qui représente bien notre état d’esprit : « Écoutez le monde changer ».
P.B : Nous nous engageons dans nombre d’actions sociales et sociétales. La dernière, la plus marquante, est de soutenir 2 artistes rouennais qui ont monté une opération de communication contre les violences faites aux femmes. Nous avons pleinement utilisé notre média pour pouvoir aider cette opération de sensibilisation. Par ailleurs, nous avons acté, il y a 2 ans, de mettre en place une ligne éditoriale sur nos écrans de communication. Le média « affichage » est un des seuls médias de masse n’ayant pas de contenu, et nous, on a choisi d’en avoir un. Nous avons, en 2020, décidé de mettre en avant 52 artistes normands de tous horizons, méconnus pour la plupart, à raison de 1 artiste par semaine exposé sur nos écrans. En 2021, cette opération s’est prolongée avec un angle sensiblement différent, en ouvrant l’espace à des personnes (toujours normandes) qui œuvrent, ou ont œuvré, pour le bien commun : elle s’intitule Portraits normands. Nous y retrouvons des contemporains, des personnages historiques, des connus, des méconnus… Flaubert ; Thierry Jardin, fondateur de Cerza, ; Hervé Guilleux, un artiste bernayen qui a exposé à New York… Ces portraits sont affichés sur tous nos écrans dans l’Eure et en Seine-Maritime.
Pascal Boutel : Oui et non. Cette crise a très lourdement affecté notre activité. Le principe du confinement, et donc de l’absence de personnes dans la rue, fait perdre à l’évidence tout l’intérêt de notre média. Dans notre manière de travailler, la crise ne nous a pas réellement affecté, car dès l’origine, le télétravail s’est inscrit dans la constitution de l’entreprise. Nous avons mis à profit ce temps suspendu pour travailler sur des sujets de fond et développer de nouvelles offres de service. Cela a permis, l’année dernière, de sortir un résultat positif alors que le monde de la régie des médias s’écroulait. Sur le plan économique, depuis la création de l’entreprise, c’est notre plus belle victoire !
P.B : On a des jeunes dans l’entreprise et pour trois d’entre eux, leurs grands-mères, qui ne connaissaient pas du tout le monde de l’affichage, surveillent nos écrans. Quand il y a quelque chose qui se passe sur le terrain, ce sont les meilleures contrôleuses qu’on puisse avoir ! D’ailleurs, je réfléchis à monter une forme de structure pour les associer d’une manière plus engagée. En fait, elles sont tellement heureuses que leurs petits-enfants trouvent leur épanouissement, que leur vision de la publicité a totalement changé, à tel point qu’elles y ont pris goût et sont devenues nos meilleures ambassadrices !
Pascal Boutel : 1. La laïcité universelle. 2. Plonger dans les Années folles de Montparnasse. 3. Assister au banquet de Platon.
P.B : L’enthousiasme, la pugnacité et la cohésion !
P.B : « Rien ne vaut rien. Il ne se passe jamais rien et cependant tout arrive. » C’est une citation de Nietzsche reprise en ouverture des mémoires de Charles de Gaulle. C’était également le slogan du club de foot que j’avais créé !
Pascal Boutel : Il se passe quelque chose à des niveaux politique, économique et sociétal sur ce territoire. Le contexte économique récent, ici comme ailleurs, a mis un coup d’accélérateur sur la notion de bien vivre à la campagne. Ici, on peut très bien évoluer dans une approche de création artistique et économique avec un cadre plus favorable que dans une grande métropole. Bernay possède une position géographique idéale : à 1 h 30 d’une des plus belles villes du monde, la capitale de la France ; à 1 heure de la côte normande riche en histoire et en paysages d’une grande variété. Mais surtout, elle est forte de talents et d’énergie, dont une jeunesse qui constitue le vecteur principal de son développement ! Pour conclure, je n’irai pas installer ma société dans une métropole.