Généreux et passionné, il dédie sa vie aux autres en suivant un parcours dans le social. Sans mauvais jeu de mots, dans le cadre de son parcours professionnel, Jaouad Henoun « s’adapte » à toutes les situations : il a apporté son concours aux jeunes dans les quartiers, il est venu en aide à nos aînés et apporte désormais son expérience aux personnes en situation de handicap. Il vous raconte son histoire.
Jaouad Henoun : Engagé, humaniste et solidaire.
Jaouad Henoun : Durant toute ma scolarité, j’ai beaucoup travaillé auprès des jeunes dans les différents quartiers en difficulté : j’ai été animateur, éducateur… Après un DESS (l’équivalent d’un master 2) en conduite du changement, à l’université de Rouen, j’ai eu l’opportunité d’intégrer les structures d’insertion en tant que conseiller en insertion dans une mission locale à Vernon, dans l’Eure. Pendant 3 ans, mon objectif était d’accompagner les jeunes dans leur parcours professionnel. Après, j’ai évolué sur une fonction de chef de projet accompagnement social que j’ai effectuée durant 2 ans. Ici, il s’agissait d’une dimension un peu plus globale en montant des projets pour les publics jeunes, comme la mise en place de dispositifs de financement de permis de conduire avec les acteurs locaux. Ensuite, la vie personnelle et la vie professionnelle m’ont amené en région parisienne, en Seine-Saint-Denis, à la ville de Bondy où j’ai occupé un poste de responsable du Bureau Information Jeunesse. En 2017, j’ai pris la responsabilité du dispositif de Réussite éducative au Centre communal d’action sociale de Bondy, dans une logique sociale et médico-sociale, pour aider les familles en difficulté dans les quartiers de Bondy. En parallèle, j’ai eu envie de changer de voie et de mettre à disposition mes compétences auprès d’un autre public. Alors j’ai suivi une formation de directeur d’établissements médico-sociaux à l’EHESP (École des hautes études en santé publique), durant laquelle j’ai réalisé différents stages dans le domaine du handicap.
J.H : Lors de l’obtention de mon diplôme, j’ai postulé et trouvé ce poste de directeur adjoint de L’ADAPT Normandie à Bernay au sein des ESAT (Établissements et Services d’aides par le travail), qui sont des structures d’insertion professionnelle et des acteurs économiques sur le territoire. C’est tout récent, j’y suis seulement depuis novembre 2020.
Jaouad Henoun : Lors de l’obtention de mon diplôme, j’ai eu envie de revenir en Normandie, d’être sur mon territoire natal auquel je tiens beaucoup ! J’ai aussi toute ma famille dans la région, étant originaire de Gaillon. Il y avait ce souhait personnel, mais également l’opportunité de L’ADAPT, car dans le cadre de ma fonction je m’occupe de différents sites en Normandie : Bernay, Évreux, Saint-André-de-l’Eure… L’ADAPT, en Normandie, c’est une vingtaine de sites entre la Haute et la Basse-Normandie et moi, mon périmètre, c’est le 27 et le 76 !
J.H : Depuis que je suis enfant, j’ai toujours eu ce besoin permanent d’aider les autres en me disant que c’est dans le collectif qu’on devient plus fort. C’est en mettant en synergie les intelligences collectives qu’on fait avancer les choses, et c’est ce qui m’a suivi tout au long de mon parcours.
Donc l’enfant que j’étais me dirait : « C’est cohérent, tu es resté fidèle à toi-même. »
J.H : Eh oui, la vie est faite de rencontres !
La première qui me vient à l’esprit, c’est celle avec un encadrant animateur en centre de loisirs, quand j’avais 14 ans. Il nous a accompagnés dans cette logique de projet et nous a aidés à nous construire, à être beaucoup plus autonomes… Après, en Seine-Saint-Denis, j’ai fait de nombreuses rencontres ! C’est tellement foisonnant de talents et de personnalités, j’en ai de super souvenirs… Je pense à un porteur de toutes les valeurs que je vous ai décrites. C’était le directeur du service qui m’a donné ma chance à Bondy. J’ai également en tête un chef d’entreprise, toujours à Bondy, qui a inséré plein de jeunes dans le besoin. Voilà, ce ne sont que des personnes solidaires qui souhaitent être un soutien pour les autres. C’est ainsi que ces rencontres m’ont inspiré et pourquoi j’ai comme leitmotiv : partager et souhaiter à l’autre ce que l’on a soi-même.
Jaouad Henoun : Ce qui m’anime le plus, c’est de mettre en musique tout ce qui est possible pour permettre aux personnes en situation de handicap de trouver leur projet de vie et de s’épanouir.
J.H : Je l’ai découvert depuis novembre et oui, franchement, je m’éclate, je m’y retrouve totalement ! Tous les jours, je rencontre des personnes riches en compétences. Et justement, c’est l’essence du travail que nous réalisons : en cassant les préjugés, en étant encore plus ouverts et en sensibilisant le public au fait que le handicap n’est pas un frein et qu’on a des personnalités qui ont de vraies compétences !
J.H : Il faut réussir à donner une vision à ses équipes pour tous marcher dans la même direction. Il est essentiel de savoir s’organiser et d’arriver à structurer le cadre dans lequel on évolue. Enfin, il est primordial d’être avec ses équipes et les personnes qu’on accompagne dans une dynamique de partage.
J.H : M’intégrer en Seine-Saint-Denis, dans le 93 ! Ha ha ha ! Non, en réalité, mon plus gros challenge a été de créer une dynamique d’insertion à Bondy. Dans le quartier, ils ouvraient un bureau d’information jeunesse avec toutes les problématiques possibles : un quartier de 25 000 habitants, une jeunesse qui représente 45 % de la population… J’ai recréé du lien et de l’envie dans les territoires isolés en valorisant les talents qui se trouvaient en chacun. Si j’ai pu laisser une petite trace à Bondy, c’est celle-ci !
Jaouad Henoun : Ma plus belle réussite, c’est évidemment ma fille ! Autrement, dans le cadre professionnel, c’est d’être arrivé à transmettre aux jeunes, aux personnes que j’ai pu accompagner, cette logique de réseaux et de transmission, en les aidant à trouver des stages, des alternances, etc., mais également en leur redonnant de l’espoir par le collectif, et ce, en leur disant : « Offrez aux autres ce que vous avez eu la chance de recevoir ! »
J.H : Quand j’étais en mission locale à Vernon, j’ai eu la chance d’être volontaire à la mise en place de projets européens qu’on appelle « Échanges de jeunes européens ». J’ai eu le privilège d’être à l’initiative et de monter des projets européens. On a accompagné des jeunes en Allemagne, qui se retrouvaient avec d’autres jeunes de pays de l’Europe à échanger sur des thématiques autour de l’apprentissage. C’était vraiment une expérience riche autant d’un point de vue professionnel que personnel !
Jaouad Henoun : C’est certain ! Le handicap, de manière générale, on n’en parle pas assez, le handicap en entreprise on en parle très peu. Et, enfin, comment fait-on une fois qu’on a une personne en situation de handicap dans l’entreprise ? Alors ça, on en parle pas du tout ! Effectivement, on a ce manque de visibilité et de lisibilité dans ce qu’on fait, et ça se ressent à travers de nombreuses situations que j’ai pu rencontrer. Par exemple, à chaque fois, lorsque j’invite des partenaires ou des clients à venir visiter l’ESAT à Bernay qui est flambant neuf, quand ils entrent, ils sont surpris de la qualité, de la capacité, de la compétence et de la réactivité de notre structure. C’est cet ensemble d’éléments qui fait qu’il faut absolument être plus visibles. C’est d’ailleurs pour cette raison que je suis dans le Cercle des entrepreneurs, pour dire : « Voilà ce que c’est un ESAT, voilà ce qu’on peut y faire, mais voilà aussi à quels besoins spécifiques on peut répondre ! » Donc c’est effectivement parce qu’on ne communique pas assez sur ce qu’on fait que j’ai témoigné à « Mode d’Emploi ». D’ailleurs, on a également demandé à ce que l’un de nos accompagnés prennent la parole, car il n’y a rien de mieux que quelqu’un qui évolue dans ce cadre pour en parler. Lui-même dit lors de son intervention : « C’est dommage qu’on ne connaisse pas suffisamment ces structures ! »
J.H : 1. Que nos structures n’existent pas, car cela signifierait que les personnes en situation de handicap seraient intégrées dans la société. Ou si elles existaient, elles auraient plus un rôle d’accompagnement en parallèle sur des formats de job coaching. Ce vœu n’est pas complètement fou : dans les pays nordiques, il n’y a pas de structure spécialisée, tout le monde est dans la société. 2. D’arriver, en Normandie, à créer un peu plus d’ESAT ou de dispositifs d’insertion à certains endroits, car il y a beaucoup de demandes et de personnes sur liste d’attente.
Jaouad Henoun : Opérationnalité, car il faut partir du terrain et de la réalité des publics. Je dirai aussi innovation dans le sens où, dans mon parcours, j’ai toujours été obligé de créer des projets pour lesquels il fallait être inventif afin de trouver des solutions adaptées et pragmatiques pour les jeunes avec les moyens du bord. Enfin, dynamique parce que comme le dit Bouddha : « Il n’est rien de constant si ce n’est le changement. »
J.H : « Le plus court chemin de soi à soi passe par autrui », aimait à répéter le philosophe Paul Ricœur. C’est ce que j’essaie d’appliquer chaque jour !
J.H : Durant la crise, en mars 2020, j’étais à Bondy, à mon poste de réussite éducative avec une dizaine d’agents à gérer. Je les ai tous mis au télétravail et, moi, je suis resté sur le terrain. Pendant cette période, on a mis en place tout un dispositif d’accompagnement à distance des personnes et des familles en difficulté. En parallèle, j’ai été sollicité par la direction du Centre communal d’action sociale pour gérer tout le dispositif de service d’aide à domicile pour les personnes âgées. À ce moment-là, j’ai pris le relais en étant quotidiennement sur le site pour gérer une dizaine de chauffeurs et d’équipes qui faisaient les courses aux personnes âgées, qui les emmenaient à leur rendez-vous médical…
J’ai envie de vous dire que la crise sanitaire n’a fait que doubler ma charge de travail. Je ne me suis pas posé de questions, je suis resté toute la durée sur le terrain et j’ai tout donné. Émotionnellement, c’est impressionnant ce que j’ai vécu avec le recul, car on comptait les décès, on voyait des personnes âgées partir tous les jours… Finalement, cette expérience a renforcé mes convictions dans cette éthique que j’ai et cet engagement que je porte. Je n’en retire que du positif : on était une trentaine d’agents au CCAS de Bondy, c’était incroyable, car on avait une gestion de la crise avec un groupe soudé.
Jaouad Henoun : J’ai envie de leur dire parce que c’est vrai et pour le délire : « Bernay influence la Normandie et la Normandie influence le monde ! » Petit clin d’œil à mes amis bondynois : Médine, Lartiste, Lino, Sofiane, Alivor, Seth Gueko, Ninho et Youssoupha dans le Grand Paris.