Le Big Quit, phénomène de démission massive aux États-Unis, a poussé 50 millions de travailleurs américains à démissionner entre 2020 et 2022. En France, l’effet prend une autre forme, et 47% des salariés adoptent le “Quiet Quit”. Les salariés limitent alors leurs efforts au strict minimum, une forme de démission silencieuse et d’un désengagement général.
La pandémie a créé un espace-temps tout à fait inhabituel pour s’interroger sur le sens de la vie et à réévaluer la finalité du travail dans nos vies… Le télétravail forcé, avec des horaires décalés et des durées de travail allongées, ont surpris bon nombre de salariés et redéfinit la place que prend le travail dans la vie des individus.
Mais alors, quelles sont les nouvelles priorités des collaborateurs? Qu’attendent-ils du monde professionnel ? Pourquoi un tel bouleversement chez les nouvelles générations?
Dans son dernier livre, La Frénésie du Bonheur (disponible aux Éditions de L’Observatoire), le philosophe s’intéresse à la quête insatiable du plaisir immédiat et au culte du « moi » qui a gagné les sociétés occidentales.
En cause? La déconstruction des grandes visions du monde sacrificiel. Les idéologies qui ont guidé les générations passées ont quasiment disparu.
En effet, pendant des siècles, l’humanité s’est nourrie de grandes visions morales, politiques ou religieuses en déclin significatif aujourd’hui. Les chiffres sont éloquents: le nationalisme, le catholicisme et le communisme sont des valeurs qui se sont perdues.
Hier, on pouvait donner sa vie pour son dieu, sa patrie ou ses idées dans l’optique de trouver le bonheur différé ! Dans l’espoir d’une seconde vie !
En effet, ces piliers idéologiques reposent sur la notion de sacrifice et sont sources de motivation pour une idée qu’on juge supérieure. On pouvait alors connaître une vie de labeur dans le présent pour un futur radieux et la promesse de récompense de l’après : après la vie (pour le catholicisme) après le travail (à la retraite), après la révolution (pour le communisme).
Aujourd’hui la quête de sens est tout autre et, pour l’humanité, le bonheur c’est maintenant !
“Si je n’ai qu’une seule vie , alors c’est ici et maintenant que je décide d’être heureux”
La crise sanitaire a ouvert les yeux de beaucoup, et la quête de sens est devenue une urgence. La recherche du bonheur est immédiate. On voit d’ailleurs les offres de développement personnel exploser. On se soucie plus volontiers de soi, et les motivations ont changé. Alors, qu’est ce qui est sacré pour les travailleurs aujourd’hui?
De nombreuses personnes ont perdu leur emploi ou ont subi un chômage partiel au cours des deux dernières années. On a d’ailleurs observé des départs en masse dans certains secteurs aux conditions de travail difficiles comme la restauration et l’hôtellerie. Les arrêts de travail sont en hausse significative. La nouvelle génération n’est pas prête à accepter les sacrifices des générations passées.
A présent, les responsables des Ressources Humaines doivent intégrer de nouveaux éléments dans leurs réflexions stratégiques, tels que le sens, le bonheur, l’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle, ainsi que l’alignement des valeurs. La culture d’entreprise et la mise en œuvre de la stratégie RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) jouent également un rôle crucial dans la façon dont les collaborateurs perçoivent l’entreprise et cela à un rôle majeur dans l’embauche de nouveaux talents.
Le sacré pour l’homme occidental aujourd’hui est la famille, les proches. Les préoccupations environnementales et sociales sont au centre. On se soucis de ce qu’on va laisser à nos enfants (la guerre, la dette, la protection sociale, l’école et la transition écologique…) On travaille pour des entreprises qui partagent nos valeurs!
« L’intelligence artificielle va changer les tâches, mais pas forcément les métiers »
Moins alarmiste que certains économistes qui annoncent la fin du travail, Luc Ferry perçoit cela comme une opportunité. Il faut voir l’intelligence artificielle comme un formidable outil qui permet à l’individu de travailler sur des tâches où il a de la valeur. Elle permet ainsi d’automatiser des tâches, d’optimiser des processus, un gain de temps! Il ne faut pas en avoir peur.
Comme l’explique Luc Ferry, “nous sommes rentrés dans une troisième révolution industrielle, celle du numérique et de l’intelligence artificielle.” L’intelligence artificielle fonctionne grâce à la puissance des ordinateurs, la qualité des algorithmes et la quantité des datas qui nourrissent les machines. Ces 3 paramètres permettent à l’IA d’aller toujours plus loin.
Cela soulève d’autres questionnements, comme le manque de souveraineté en Europe… Comment exercer un contrôle autonome sur le développement? Comment réglementer? Sur quelles valeurs éthiques, des droits de l’homme, de confidentialité des données et de sécurité se fier?
Et dans cette métamorphose du travail, quel sera le rôle majeur de l’education nationale pour former les jeunes. Selon une récente étude, les générations nouvelles auront en moyenne 12 métiers dans leur vie, comment la formation doit évoluer?